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Une nuit de cauchemar au pays de la mort

Aujourd’hui, j’ai fait un cauchemar un peu bizarre. Je dois vous le raconter. Ce n’est pas qu’il soit drôle, ou pour le plaisir. Je sens, très clairement, que je dois vous le raconter, comme si c’était une obligation morale en quelque sorte.


Comme tous les cauchemars, je ne me souviens pas de tout, parce que c’est décousu, parfois ça n’a pas de sens. J’ai donc un peu trafiqué les faits, si on peut parler de faits à propos d’un cauchemar. Bref, j’ai essayé de donner du sens à ce qui parfois, n’en avait pas. J’espère que vous me pardonnerez cette liberté prise avec ma vie nocturne inconsciente…


J’étais dans un endroit verdoyant, quelques collines, une vallée encaissée où subsistaient quelques brumes matinales, comme celles d’Avallon, qui rendaient le paysage diffus, un peu comme quand je mettais de la vaseline sur l’objectif de mon appareil photo pour rendre les flous plus artistiques.


Le soleil commençait à pointer et je ne sais pas pourquoi mais la chaleur que je ressentais me donnait l’impression de m’approcher de l’enfer.


Tout d’un coup, sans que rien ne vienne l’annoncer, je me trouvais au milieu d’une multitude de gens, non pas vraiment une multitude au sens d’une manifestation mais quand même il y avait une trentaine de personnes, ce qui pour mon inconscient nocturne, est beaucoup. Je ne connaissais personne. Il y avait des gens en armes, des armes de poing et des plus grosses, style R15, la version civile du M16, celle qui tue fréquemment aux Etats-Unis. Plusieurs femmes aussi. Non, n’allez pas imaginer tout de suite qu’il s’agit d’un rêve érotique. Non elles étaient très « normales », de ces mères de famille qu’on croise sans arrêt lorsqu’on fait ses courses, la quarantaine bien faite, la cellulite et les poignées d’amour bien visibles, certaines plus que d’autres. Tout ce groupe a commencé à monter la colline, moi toujours au milieu, en me demandant bien ce que je faisais là. Et ce qui me frappait le plus à ce moment, c’était le silence retenu, quelques paroles, sans plus, qui ne voulaient rien dire. Et puis, la pente était raide et ce qui s’entendait surtout, c’étaient les halètements, de ceux qui avançaient rapidement. Moi, j’avais du mal à rester dans le rythme. Je commençais à paniquer de ne pas pouvoir suivre. Parce que dans ce cauchemar, ce qui me faisait peur à ce moment-là, c’était de me perdre ou de disparaître.


Je ne sais pas combien de temps a duré la montée, le temps dans les rêves ou les cauchemars est toujours très relatif mais à un moment donné, le groupe s’est arrêté. Il y avait des rubans jaunes avec des inscriptions : « Interdiction de passer – Scène de crime ». Et là, sans que je m’en rende vraiment compte, le groupe s’est séparé en deux morceaux. Le premier est passé de l’autre côté du ruban scène de crime, l’autre est resté figé, comme moi.


Les premiers se sont déshabillés, enfin, plutôt habillés. Certains étaient bleus, d’autres blancs. Et tout autour, ceux qui avaient des armes ont entouré les groupes, comme s’ils avaient pour tâche de les protéger, même s’ils avaient l’air plutôt relax, certains avaient des sucettes en bouches tout en ayant le doigt sur la gâchette de leur R-15.


Une fosse avec des ossements était ouverte un peu plus loin. Les femmes ont commencé à réclamer, de pouvoir aller voir, mais les bleus les en empêchaient, disant qu’il y avait la procédure, et puis la procédure, encore la procédure. Finalement, celle qui avait l’air la chef a réussi à passer de l’autre côté. Puis ce fut un cri, un petit cri, qui n’avait l’air de rien mais qui s’est transformé en plainte… Les bêtes avaient mangé la moitié du cadavre. Ce que j’ai compris dans mon cauchemar, c’est que le cadavre avait été découvert la veille mais qu’il n’avait pas été protégé et que les animaux sauvages, un style de petit tigre, ou plutôt un gros chat sauvage avait mangé la moitié du corps. Et tous les bleus et blancs qui n’arrêtaient pas de dire, les procédures, le protocole, les procédures, le protocole, les procédures, le protocole, comme un chant funèbre répétitif. Et les femmes de pleurer, de faire des signes de croix, d’invectiver les bleus et les blancs qui se réfugiaient tant bien que mal derrière le ruban « scène de crime ». Celle qui avait de plus en plus l’air de la chef, essayait de calmer ceux qui criaient le plus fort.


Puis il y a une sorte de vide, et je me retrouve avec le même groupe un peu plus haut sur la colline. Les hommes ont des piques en fer, un peu comme des bâtons de marches avec une sorte de roulette au-dessus, qu’ils plantent inlassablement dans le sol, les retirent et sentent la pointe, sans arrêt. D’autres, avec des machettes, taillent les arbustes, pour se frayer un chemin dans la végétation.


Intrigué, je m’approche d’eux, pour leur demander ce qu’ils sentent. Un des leurs, un peu plus costaud, me répond tout sourire : « la mort ! ». « Quand ça pue la mort, tu es sûr qu’il y a un macchabé enterré en-dessous, ou deux, ou trois, ou quatre. Ça c’est les bleus et les blancs qui le diront, demain, dans deux jours, dans un mois, dans un an. Au rythme où ils travaillent… ».


Les bleus arrivent, toujours accompagnés d’hommes en armes, remettent des bandes jaunes « scènes de crime » pour délimiter un autre périmètre. Deux policiers avec des chiens qui flairent confirment 5 nouvelles fosses. Les chiens sont beaux, un épagneul et un berger malinois. Leur envie de vivre tranche avec l’ambiance de mort qui règne. Et puis cette odeur de mort qui sort de partout, de la fosse ouverte, mais aussi qui vient de plus haut, poussée par le vent qui rabat les effluves d’autres fosses.


Et le groupe de femmes, avec quelques hommes armés de piques, les plantent et les plantent, encore. Quand le sol est mou, la pique s’enfonce, profondément. Ils vont chercher une autre pique, pour aller plus profond. Et ils sentent, ils sentent, la mort. Et quand ça sent la mort, ils ont l’air, l’espace d’une seconde, heureux, heureux d’avoir trouvé, heureux d’avoir encore gagné sur les bleus qui ne cherchent pas, qui ne trouvent pas, qui ne font que confirmer ce qu’eux ont trouvé. Alors on préfère les chiens, qui ont l’air de jouer, de s’amuser, mais aussi de comprendre, tout ! Ils se collent à leur maître, se laissent caresser, semblent parfois atterrés. Un des hommes vient de trouver une nouvelle fosse, se signe rapidement, comme pour se protéger, ou alors en signe de respect pour le mort, ou les morts.


Tout le monde est assis, on attend, Dieu sait quoi ! Cette partie du cauchemar est plus confuse. Il y a énormément de monde, qui s’embrassent ou plutôt veulent s’embrasser, se serrent dans les bras les uns des autres, mais au moment de se prendre dans les bras, il y en a toujours un qui passe à travers de l’autre, comme s’il n’était pas en chair et en os, mais simplement une image, une représentation, un peu comme un fantôme. Et moi, j’assiste à tout cela, avec un mélange d’effroi et d’incrédulité.


Le cauchemar se termine un peu bizarrement. Je me retrouve dans la ville sans brume. Un convoi de voitures blindées la traverse à toute allure, lampes bleues clignotantes et sirènes allumées.

Mexico, 8 mars 2019, 40.000 disparus, peut-être 100.000, à moins que ce ne soit encore plus…

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